La colère de Zapkt – La fondation de Mîrcalensil
« Ah, quelle bande de mécréants ! Tous des idiots, des incapables ! Une bande d’irresponsables incapables de voir où se situe leur avenir ! Ah, ils préfèrent donc cet idiot ? Eh bien qu’ils le suivent, je serai donc le seul à ne pas faire partie du troupeau ! » Voilà maintenant plusieurs heures que Zapkt avait appris l’échec de son coup d’Etat, et sa colère ne s’estompait pas le moins du monde. Il errait sans but dans les marais aux alentours de Failariël, ne sachant pas ce qu’il faisait car totalement obsédé par ses pensées sombres.
« Mais comment est-ce possible ? Comment ai-je pu échouer avec le soutien des trois autres royaumes ? Même les Reikon étaient avec moi ! C’est peut-être ce qui m’a perdu, au fond… Non ! C’est faux ! Si j’ai échoué, c’est uniquement à cause de cette bande d’incapables ! Et toute cette fortune amassée, cette puissance montrée au peuple, à quoi auront-t-elles servi ? A rien ! Tu vois, ma fidèle Phaëlie … » -Zapkt s’adressait là à sa pelle en or, preuve qu’il commençait à perdre l’esprit-
« …au final l’argent ne sert à rien. D’ailleurs, tout est inutile. Seul chercher des trésors est amusant… Allez, viens ma belle, continuons à en chercher, il ne nous reste plus que cela à faire de toute façon… » Et ainsi Zapkt repartit à l’aventure accompagné de sa fidèle pelle en or. Nul ne sait où il partit, mais toujours est-il qu’il réapparut quelques jours plus tard à Failariël, un étrange objet à la main. En ville, la population semblait très agitée, effrayée par les évènements en cours : les prêtres annonçaient la fin du monde, et la plupart des guerriers étaient partis combattre l’Ordre Noir, groupe de guerriers destructeurs assoiffés de sang.
Zapkt, ne voulant pas attirer l’attention vers lui, alla discrètement trouver Riberia, la guide Seizonne, et l’emmena chez lui afin de lui montrer sa dernière trouvaille afin que celle-ci l’analyse.
Arrivé dans sa demeure, remplie d’une quantité inouïe d’objets tous plus précieux les uns que les autres (et nul ne doute que si l’ambiance n’avait pas été à la guerre, de nombreuses personnes seraient venues piocher dans cet amas de richesse pendant son absence de quelques jours), Zapkt tendit la main pour présenter l’étrange objet à Riberia. Celui-ci, de forme plutôt cubique, ressemblait vaguement à un aléaporteur. Des inscriptions en diverses langues anciennes s’illuminaient d’elles-mêmes sur ses faces. La guide fut tout de suite frappée par la quantité de magie impressionnante se dégageant de l’objet, malgré le fait qu’elle n’avait que de faibles notions en magie et n’était donc que peu apte à sentir la magie.
« Je ne sais pas ce que c’est… » déclara-t-elle.
Elle prit l’objet en main pour l’examiner de plus près, et doucement, commença à le manipuler. Une des faces du cube pivota brusquement, et un flash violent se produisit.
Zapkt, aveuglé, tenta de rouvrir les yeux. Ce qu’il vit lui fit croire à une hallucination : les murs de sa demeure semblaient se désagréger en fines particules et disparaître dans la blancheur éblouissante du flash. Puis il s’évanouit.
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Quand il se réveilla, rien ne semblait avoir changé. Il y avait toujours quatre murs autour de lui et un plafond au dessus de sa tête, et Riberia était toujours là à côté de lui, se relevant en recouvrant ses esprits elle aussi.
« - Que s’est-il passé ? maugréa Zapkt
- Je ne sais pas… » répondit la guide en se tenant la tête.
Soudain, quelque chose attira l’attention du chasseur de trésor. Dehors. Il regardait en direction de la fenêtre et restait là, hagard.
« Où… Où sommes-nous ? » lâcha-t-il, désemparé.
Riberia suivit son regard et ce qu’elle vit la stupéfia. Dehors, il n’y avait plus rien. Rien qu’une plaine vide sur laquelle pesait un brouillard épais.
Zapkt se précipita vers la porte et l’ouvrit en grand. La même plaine se trouvait devant se porte, mais il aperçut des Seizons, hagards, se demandant ce qu’il se passait. Le brouillard se dissipa rapidement, sans doute sous l’influence de quelque mécanisme magique. Le chasseur de trésor découvrit donc qu’une bonne centaine de personnes étaient perdues dans les plaines qui s’étendaient autour de sa maison. Riberia, qui l’avait rejoint, murmura :
« Serions-nous… Dans le Nouveau Monde ? » Le Nouveau Monde. Zapkt sourit. C’est comme cela que les prêtres appelaient l’hypothétique « autre monde » sur lequel de nombreuses personnes comptaient pour échapper à l’assaut des chevaliers noirs. Il était loin d’être convaincu de son existence. Soudain, un cri venant de la foule qui, naturellement, avait commencé à se former autour du seul bâtiment des environs, attira son attention. Un prêtre s’écriait :
« Le Nouveau Monde ! Nous sommes dans le Nouveau Monde ! Miracle ! »Zapkt écarta la foule et s’avança :
«- Qu’est ce qui vous fait croire que nous sommes dans le Nouveau Monde ?
- Je le sens… Aucun doute possible… La magie ambiante n’a rien à voir avec celle dont j’ai l’habitude… De plus, je ne ressens plus aucune énergie maléfique dans les environs… C’est évident, nous avons changé de monde. »
- Vous en êtes donc sûr ?
- Absolument certain.
- Bien, je dois donc admettre que nous sommes donc arrivé dans le Nouveau Monde… Cet étrange objet nous a donc tous téléportés ici, et ma maison avec… Malheureusement, il semble que cette dernière soit le seul bâtiment à avoir fait le passage vers ce monde.» Il réfléchit un instant.
« Où est le roi ? »Riberia prit la parole :
« Je crains que, comme tous les guerriers, il soit parti se battre contre l’Ordre Noir. Il va donc falloir refonder Failariël sans roi et sans guerrier. » Elle fit une pause, puis, se rappelant quelque chose, ajouta :
« A part vous. » «- Il nous faut un roi ! » déclara un Seizon dans la foule.
- Oui, élisons un roi ! » répondit un autre.
- Mais qui ?
- Seul un combattant peut nous guider… Elisons le seul présent !
- Nous n'avons pas vraiment le choix...
- Oui, Zapkt roi ! » Pendant que des exclamations s’élevaient de la foule, Zapkt réfléchit. Roi ? Ils voulaient qu’il soit leur roi à présent ? Eux qui s’y étaient opposé, quelques jours auparavant ? Mais quelle bande d’hypocrites…
Alors que la folie s’emparait peu à peu à nouveau de lui , il déclara soudain :
« - Bien, vous êtes donc tous d’accord pour que je sois le nouveau roi ?
- Oui, répondirent les Seizons unanimement.
- Bien, alors j’accepte d’être le premier roi de la nouvelle ville Seizon. Ah, mais il faut d’abord que je fonde cette ville. Ma première action en tant que roi sera donc de déclarer que, ici, dans ces plaines, je fonde la nouvelle capitale Seizonne. Cette ville s’appellera… Mîrcalensil. Ma seconde action sera de supprimer le système d’élections libres : désormais, chaque roi ou reine du royaume Seizon désignera lui-même son successeur. Cette désignation est irrévocable. » Alors que des rumeurs de protestation commençaient à s’élever dans la foule, Zapkt continua rapidement.
« Ma troisième action sera de nommer Riberia ici présente nouvelle reine Seizonne. Vous avez refusé mon élection il a quelques jours, je ne peux pas continuer plus loin. Voyez donc avec elle à présent. Mais au moins je resterai dans l’histoire comme le premier roi Seizon du Nouveau Monde, AHAHAH ! » Il se tourna vers Riberia :
« Riberia. Ne t’inquiète pas, je ne te laisse pas comme ça avec le royaume sur le dos. Tu vois les richesses dans ma maison ? Prends en la moitié, avec cela il y a largement de quoi refonder une ville entière. Les marchands que sont les membres du royaume Seizon n’auront aucun mal à échanger tout cela contre des matières premières : nous ne sommes certainement pas les seuls à avoir réussi à atteindre le Nouveau Monde. »Riberia, hébétée, pris la parole :
« - Mais… L’autre moitié, qu’allez-vous en faire ?
- Ah ah, bonne question ! Eh bien vois-tu, si ce « Nouveau Monde » est aussi nouveau qu’on le dit, alors cela signifie quelque chose de terrible pour moi : si personne n’y a jamais vécu, aucun trésor d’anciennes civilisations n’est enfoui dans le sol ! Rien ! Le métier de chasseur de trésors est mort ! Je ne peux le tolérer… Je vais donc m’en aller avec la moitié de ma richesse et l’enterrer afin que les futurs chasseurs de trésors aient quelque chose à trouver ! Je vais explorer ce monde et cacher des trésors partout ! D’ailleurs, je compte sur toi pour répandre cette information ! Avec un peu de chance, je lancerai une nouvelle vague d’enthousiasme pour cette activité extraordinaire qu’est la chasse au trésor ! » La nouvelle reine n’osa pas contredire l’archer, que la folie semblait au moins rendre heureux. Il avait au moins cédé une richesse aussi conséquente qu’il le disait : jamais un royaume n’en avait réuni autant. Grâce à la téléportation de la maison de Zapkt, la gloire du royaume Seizon pourrait reprendre de plus belle dès la fondation de la nouvelle ville. Il faut croire que c’est le destin du royaume Seizon d’être riche…