Imprimer la page - A la Taverne de la Plume du Dragon

Fifrelo arriva devant la taverne à son tour, une splendide bâtisse tout en bois et pierres brutes des carrières de l’île, agglomérées au mortier de chaux. De puissants colombages renforçaient l’étage supérieur. Le toit de chaume se déployait loin des murs, ombrageant le pourtour du bâtiment. Deux fenêtres en vitrail surplombaient la porte d’entrée devant laquelle Fifrelo se tenait, contemplatif. Il poussa le lourd panneau de chêne. Dés qu’il fut entré il s’enquit aussitôt de la qualité des boissons servies, et comment elles avaient été préparées, si les orges avaient été correctement germées, puis torréfiées, si la saison des pluies n’avait pas atrophié le houblon, ou gâté le grain, de quel type de fermentation..... tout à coup il s’interrompit et se souvint qu’on l’attendait. Il parcourut la salle d’un coup d’oeil et aperçut Oniria attablée dans un coin, qui sirotait un jus de mûres. Il espérait qu’elle ne lui tiendrait pas rigueur de ne pas lui avoir tout de suite porté attention, mais ce genre d’établissement, le mettait tout en joie, d’autant que c’était là l’oeuvre de parrain Galzbar.
Il s’écria : « bien le bonjour belle Oniria, ce jus de mûre semble porter à votre teint un éclat des plus délicieux. Saviez vous que les mûres ont des propriétés tout à fait remarquables, et que nous devrions en consommer plus souvent. » Se tournant vers le tavernier : « une bière mon ami» il reprit : « est-ce vrai que l’on peut ressusciter ici même ? c’est merveilleuse nouvelle ! Mais parlez moi un peu de vôtre clan, les Coeurs-de-Dragons, et de vos projet. J’ai fait une demande il y a quelques temps pour m’intégrer dans vos rangs et j’imagine que vous voudrez en savoir plus sur mes intentions...

Oniria salua avec joie le nouveau venu.

- Bonjour Fifrelogrelin ! Je suis ravie que vous ayez pu trouver le chemin de cette nouvelle taverne. Elle est magnifique n'est-ce-pas? Nos architectes sont vraiment très talentueux! J'espère qu'elle sera un nouveau lieu de rassemblement pour tous les Tsuchis...

Elle le laissa s'asseoir avec sa bière et poursuivit plus bas, sur le ton de la confidence:

Je suis au courant pour le jus de mûres. J'ai quelques talents en alchimie et j'use souvent de cet ingrédient dans mes diverses préparations. Il a le mérite de donner un goût sucré aux potions les plus amères, et apporte de nombreux bienfaits. Santé, vitalité, joli teint pour les dames et, à ce que l'on dit, vigueur pour les messieurs...

Oniria sourit malicieusement et changea de sujet:

Mais vous vouliez goûter à notre raku je crois. Souhaitez-vous en commander un verre? Je vous préviens, c'est une boisson de guerrier.... Personnellement, je la trouve bien trop forte pour moi, j'en bois assez rarement. Mais mes compagnons en raffolent, surtout après les batailles, quand ils souhaitent fêter la victoire sur quelque ennemi mizu !

Elle sourit en se rappelant les soirées mémorables passées au manoir des Coeurs de Dragon, à refaire le monde pendant des heures un verre de raku à la main et un gigot d'agneau rôtissant dans la cheminée... Puis, sans se laisser emporter par ses souvenirs, elle répondit à l'interrogation de Fifrelogrelin par une autre. Ce jeune sorcier l'intriguait, son arrivée récente sur les terres tsuchies avait été un événement dans un royaume qui avait un peu trop tendance à se dépeupler ces derniers temps.

Avant de vous parler de mon clan, j'aimerais que vous m'en disiez un peu plus sur vous. Il n'est pas si courant de voir des nouveaux venus sur nos terres, aussi suis-je dévorée de curiosité. Vous m'avez parlé de votre passé de bouffon du roy, j'aimerais vraiment que vous m'en disiez un peu plus...

Elle se tut et sirota une gorgée de jus de mûres en attendant la réponse du jeune sorcier.

Fifrelo loua fort les architectes, et n’osa pas commander de jus de mûres après la révélation qu’Oniria lui avait faite sur une certaine propriété ; l’intendante abordait avec facilité des sujets déconcertants, surtout pour un jeune mage déjà impressionné. Malicieuse Oniria ! La jeune dame semblait posséder un solide aplomb. Fifrelo commanda le raku des guerriers puis répondit en ces termes : « vois-tu, la charge de bouffon du roy est une place à la fois enviée et méprisée. C’est tâche ardue que de divertir la cours ; les faire rire, bien sûr, mais aussi répondre à leurs traits d’esprit avec esprit soi même sans toutefois se montrer trop spirituel, cela pourrait offenser. Il faut donc savoir offenser mais avec juste proportion. Les bons mots sont donc un exercice virtuose auquel beaucoup renoncent par peur de perdre leur statut. La grimace plaît aussi. Certaines sont admises, d’autres non. Les cabrioles et le jonglage font partie de nos attributions, et la musique aussi, bien que peu d’entre nous s’y exercent, d’autant que la cours a déjà ses musiciens. Et pour tout vous dire je manie aussi un peu de sorcellerie, chose fort rare pour un bouffon. Voilà, c’est un fort beau métier à mon avis. Mais parles moi à ton tour, j’ai tellement à apprendre. L’intendance est une lourde tâche n’est-ce pas ? Et tes travaux à la bibliothèque, en quoi consistent-ils ? Tu dois sans nul doute détenir un savoir précieux. Qui sont les membres de ton clan ?»
Tant de questions se pressaient. Il vida sa bière d’un trait car le raku venait d’arriver.

Oniria écoutait attentivement les paroles du jeune sorcier. Le travail d'un bouffon du roy lui était totalement étranger, il n'y en avait jamais eu à la Cour tsuchie. La jeune femme avait souri en remarquant le trouble de son invité lorsqu'elle avait évoqué les propriétés du jus de mûres. Voyant qu'il était un peu intimidé, et sans doute fort peu coutumier de la franchise, voire de la rudesse des femmes tsuchies, elle décida de se montrer un peu moins taquine.

S'habituer à un peuple où les femmes étaient des guerrières farouchement indépendantes et souvent très directes, en acte comme en paroles, devait être compliqué lorsqu'on était plutôt accoutumé aux rodomontades et aux hypocrisies d'une Cour royale. Oniria songea aux femmes du clan Moulin Rouge aujourd'hui disparu, qui faisaient autrefois des ravages sur les champs de bataille. Aussi bien par leurs charmes que par leurs armes d'ailleurs... Elle songea également à la surprise de son époux mizu, lorsque c'est elle qui l'avait demandé en mariage, au mépris de toutes les convenances du peuple de l'eau. Ainsi étaient les femmes tsuchies, libres et sauvages, difficiles à apprivoiser pour qui ne les connaissait pas.
Le jeune sorcier qui venait de débarquer à Karkann devrait apprendre un certain nombre de choses sur elles, s'il ne voulait pas commettre d'impair. Oniria se promit de lui en parler lorsqu'ils se connaîtraient un peu mieux. Pour l'heure, elle se devait de répondre à sa curiosité dévorante, tout comme il avait répondu à la sienne.

« Que de questions! s'exclama-t-elle. Je vais commencer par la bibliothèque. Je suis maître bibliothécaire du royaume. Je suis chargée, avec l'aide d'Elixirias, Maître scribe du royaume et mage de mon clan, de garnir la Tour des Sages, la bibliothèque de Kyaro avec tous les ouvrages que nous trouvons, échangeons, achetons, au cours de nos voyages. Je m'occupe de les dénicher et elle se charge de les recopier grâce à ses talents d'écriture.
Au fil du temps, nous avons réussi à obtenir une bibliothèque bien garnie, qui contient une grande partie du Savoir disponible sur cette planète. Il me manque encore quelques ouvrages, mais je ne désespère pas de les récupérer un jour. Grâce à la lecture, nous pouvons par exemple apprendre des langues étrangères pour mieux comprendre nos amis voire nos ennemis. Mais aussi des langues anciennes, très utiles pour certaines quêtes, lorsque nous devons rencontrer d'éminents personnages de l'Ancien Monde. Je maîtrise parfaitement le larsius (la langue de mon époux, mais aussi des Mizus, nos ennemis héréditaires) ainsi qu'en Pagdi, la langue des reikons, le peuple qui vit dans les montagnes enneigées du Nord. Je maîtrise aussi presque complètement le Fari, qui est la langue des Seizons, le peuple marchand qui vit dans les marais de l'Ouest. Enfin, je me débrouille pas mal en Talym, Krusi et Kranem, trois langues anciennes que j'ai longuement étudiées lors de mes voyages ou dans de vieux livres. Il me reste cependant des progrès à faire en Legam, je comprends à peine la moitié de ce que j'en lis...

Par ailleurs, nous devons faire des recherches, afin de dénicher des plans pour nos artisans. La Tour des Sages et immense et les plans sont souvent bien cachés, sous des montagnes d'autres ouvrages poussiéreux. Les rechercher est donc un travail de longue haleine, effectué par les adeptes d'Oneru (le dieu de la sagesse). Cela fait quelques semaines que je m'acharne à trouver quelques plans et je dois dire que j'avais bien besoin de prendre un peu l'air !

Concernant l'intendance, heureusement je ne suis pas seule pour m'en charger. Nous sommes plusieurs au Conseil tsuchi et nous nous entraidons les uns les autres. Ender, notre nouveau roi, vient de remplacer la reine Mahîna. Il a pour le moment conservé les mêmes personnes au Conseil. Il y a Ezekiel, notre vaillant général des armées, Arcanis, notre éminent recteur, que tu as sans doute déjà dû rencontrer, puisqu'il est chargé d'accueillir les nouveaux arrivants. Et bien sûr Erktes, notre érudit Gardien du culte. Il gère le Savoir de notre nation et le culte de Shankara, la déesse de la guerre qui protège notre peuple. »

Oniria se tut un instant, le temps de prendre une gorgée de jus de mûres et d'attendre d'éventuelles questions supplémentaires. Elle avait un peu peur de noyer le nouvel arrivant sous un flot d'information.

Des bruits de sabots se font entendre au dehors, puis des pas et enfin la porte s'ouvre, grinçante. Un homme gris de la tête au pieds entre dans la taverne. Ces cheveux, de la même couleur, inspirent la sagesse du vieux guerrier, acquise dans les batailles et les nombreux voyages aux quatre coins du monde. Sa besace de cuir et sa cape élimée et rapiécée ajoutent à cette impression. Mais ce sentiment s'évapore instantanément alors qu'il hèle l'homme derrière le comptoir d'une voix jeune et forte :

- "Holà, Tavernier ! C'est en creusant sans boisson, qu'on finit sec comme Krank ! Prépare-moi une grande choppe de Raku Raku et une encore plus grande de jus de carottes !"

Il s'avance alors vers le comptoir tandis que le tavernier le regarde d'un œil réprobateur tant son client répand une quantité phénoménale de poussière derrière lui. Arrivé au comptoir, il réclame un trait de jus de mûre dans le jus de carotte, prend la chope et ressort de l'auberge quelques instants. Il revient prendre son Raku Raku et s'adresse à nouveau au barman.

- "Vous offrirez à vos deux clients là bas ce qu'ils voudront. Sans vouloir paraitre pessimiste, leur verres sont à moitiés vides !"

Le barman acquiesça de la tête et disparu dans l'arrière boutique pour refaire le plein de jus de carottes. Lorsqu'il revint, son client avait négligemment posé sa cape sur le comptoir et arpentait la salle, laissant toujours autant de poussière derrière lui. Après avoir examiné la pièce sous toutes ses coutures et ausculté les murs et les colonnes, il vint s’assoir à la seule table occupée. Sans même saluer les convives, il s'exclame :

- "Ce mélange d'authentique et d'avant-garde et ce côté fringuant dans la décoration, c'est bien du Galzbar tout craché ! S'il avait meilleur goût dans ses créations, sans doute aurait-il rattrapé le maître."

- "Mais je manque à tout mes devoirs !"

Se relevant, il fit une courbette galante à la limite du ridicule et dit :

- "Bien le bonjour Dame Oniria, votre beauté illumine cet pièce comme le soleil illumine notre île."

Puis se relevant et s'adressant à son compère :

- "Bonjour jeune sorcier, vous devez être le saltimbanque dont j'ai entendu filtrer quelques bribes au palais. Nos chemins ne se sont pas encore croisés, alors vais-je me présenter : Kawarschrei, archer et citoyen dévoué au royaume."

Il but une gorgée de Raku et reprit à l'intention d'Oniria:

- "Alors, où en sont vos recherches ? On dit au palais que vous ne sortez plus de la Tour et qu'elle est sans dessus-dessous depuis que vous y êtes installée. J'ose espérer que ces ragots ne sont pas fondés !"

Oniria se mit à rire en reconnaissant l'un des illustres architectes du royaume. Ce sacré Kawa était toujours aussi désinvolte et vil flatteur.

« Bien le bonjour Kawarschrei ! Je te trouve plutôt sévère avec Galzbar, moi je trouve cette architecture tout à fait ravissante. Même s'il n'a pas ton expérience, il a la fraîcheur de la jeunesse. Et cette taverne est réellement très agréable à regarder ! Quant à toi, c'est ta poussière qui semble illuminer cette pièce. Où donc es-tu allé traîner? Et je t'ai dit mille fois de me tutoyer, je suis intendante, pas reine...»

Oniria se montrait délibérément taquine avec l'archer, qu'elle savait très fier de ses propres réalisations. Il n'avait d'ailleurs pas hésité à se montrer un peu impertinent avec elle, il était bien normal qu'elle lui renvoie la balle. Elle songea en son for intérieur que son invité devait être bien surpris des rapports sans cérémonie qu'entretenaient les Tsuchis entre eux. Elle espérait qu'il n'en était pas trop choqué. Bah, il faudra bien qu'il s'y fasse, songea-t-elle en observant du coin de l'oeil la réaction de Fifrelogrelin. Elle adressa ensuite un sourire malicieux à Kawa en lui répondant:

« La Tour des Sages est un fouilli innommable et son architecture tarabiscotée en fait un repère idéal pour les araignées et autres créatures de l'ombre. Je me demande bien quel est l'architecte farceur qui l'a construire ainsi. Je me contente d'y faire un peu de rangement afin de rechercher de vieux parchemin. Et j'en profite pour dépoussiérer tous les ouvrages anciens, ils en ont bien besoin! Les ragots déforment toujours quelque peu la vérité, tu devrais le savoir...»

Fifrelo ne savait quoi des paroles d’Oniria ou du raku était le plus enivrant. La bibliothèque semblait un endroit magique regorgeant de trésors de connaissances du monde, montagnes de secrets enfouis au plus profond d’une science mystique déchiffrable par ses seuls adeptes. Qui n’a jamais rêvé un jour d’en comprendre les divins mécanismes ? Qui n’a jamais rêvé d’en contempler l’obscure beauté à l’impalpable scellée ? Oniria avait un savoir des plus étendus, ce qui forçait son admiration, en plus de la façon sensuelle dont elle buvait ce jus de mûre....maudit jus de mûres ! Fifrelo n’arrivait pas se l’enlever de la tête, ni les pensées qui allaient de pair et commençaient à devenir inconvenantes.

« Quel fascinant récit ! » s’écria t-il. « j’ai hâte de visiter cette bibliothèque à mon tour et que vous m’initiiez à tous ces secrets... » dit-il en s’emportant. « Mais cela est sans doute trop tôt. Comprenez, je veux tout savoir sur ce qui existe, et vous avez attisé ma curiosité au delà de ses limites. Si j’ai bien compris, acquérir un ouvrage est le premier pas. Il faut nécessairement le recopier pour qu’il puisse servir... ? Sans vouloir offenser, votre mari mizu est il lui même en guerre contre nous ? tue-t-il des tsuschi ? Pardonnes mon abruptesse...

On entendit des sabots au dehors. Puis un pas lourd. Un vieil archer dépenaillé et crasseux entra. Il offrit à boire ; c’était un ami. Il braillait fort et brassait beaucoup de poussière. Il commença par critiquer ouvertement l’ouvrage de Galzbar, ce qui déplut fortement à Fifrelo, qui ironisa :
« Bonjour à toi, grand seigneur Kawarschrei ! permets moi de m’empoussiérer la main avant de te la serrer, je ne voudrais pas paraître impoli devant tant de grâce. » Il lui tendis une main crasseuse à souhait. « Ainsi l’oeuvre de parrain Galzbar te déplait ? Serait-elle de mauvais goût ? Comme cette vieille cape rapiécée dont tu te pares, ou cette maladroite galanterie ? » Fifrelo se devait de défendre coûte que coûte Galzbar, même en face d’un archer aussi expérimenté et personnage méritant du royaume. Il faut dire que son verre de raku était à moitié vide, et c’était la première fois ! Peut-être de là lui venait tant de hardiesse. Oniria eut des paroles plus modérées, et plus sages.

A Fifrelogrelin :
- "Enchanté, c'est donc toi le protégé de Galzbar. Les amis de mes amis sont également les miens et ton audace me plaît ! Je pense que nous allons bien nous entendre."

Il se retourne sur sa chaise pour appeler le tavernier.

- "Mon ami semble avoir soif et nos verres sont vide ! Auriez-vous de ce fameux Raku Raku à l'extrait de nénuphar ?"

Puis, aux paroles d'Oniria et de Fifrelogrelin , il se rend compte qu'il a visiblement froissé ses deux camarades et réalise qu'il est intégralement recouvert de poussière.

- "Je pense m'être mal exprimé, vous prêtez tous deux à mes paroles un venin qu'elles n'ont pas ! Ma critique n'est pas sur le fond mais sur la forme, Galzbar a fait du très bon travail. Cette bâtisse est conçue pour durer, ses fondations ont l'air bien ancrées au delà de la couche de sable et ses murs sont assurément assez solide pour faire face aux fréquentes tempêtes qui balaient le sud de l'île. Mais le faste de cette auberge aurait une place toute choisie dans un quartier cossu de Mircalensil plutôt que sur une plage de Karkann !"
- "Sans doute s'est-il inspiré de l'auberge Seizonne de Couronne, mais quoi qu'il en soit, tout cela est affaire de goût et le raffinement de cet endroit attire visiblement une clientèle plus civilisée.", dit-il avec un sourire en coin à l'intention d'Oniria.

- "Quant à mon état actuel, si je vous semble bien poussiéreux c'est que je reviens des mines de fer, à l'est. Cette saleté s'incruste partout et vous assécherait même un golem ! Je vous prie de m'excusez un instant, je pense qu'un brin de toilette ne me ferais pas de mal"

A ces mots, il retourne chercher sa cape sur le comptoir et sort de l'auberge quelques minutes. A son retour, il entre avec la choppe de jus de carotte vide et avait troqué sa vieille cape contre une grande cape rouge orné du symbole du Royaume. Son visage encore humide parait presque juvénile et ses cheveux un peu plus propres sont en fait d'un brun foncé et comme ses yeux, ils ont un étrange reflet rouge braise. Il se rassoit à la table et termine sa boisson alors que le tavernier apporte une seconde tournée.

- "La Tour des Sages, un vrai chef d'oeuvre !", ironisa-t-il, "C'est ce qui arrive quand on demande à deux talentueux architectes rivaux de travailler sur un même bâtiment !"

A l'intention de Fifrelogrelin, qui n'était probablement pas au courant des vieilles histoires du royaume :

- "Satia et moi étions les meilleurs architectes du royaume à l'époque. Nous avions alors rivalisé d'ingéniosité et d'audace pour construire une bibliothèque splendide. Pour accélérer la construction, nous avions décidé de faire chacun une partie du plan. Ainsi je devais m'occuper de la base tandis qu'elle s'occuperait de la structure interne et de la partie haute. Mes plans prévoyaient un large édifice en carré avec une grande cour intérieure. Au centre de celle ci, une tour également carrée devaient contenir les ouvrages les plus rares. Le plan de Satia prévoyait une large tour ronde d'où partaient plusieurs ailes en formes d'alcôves. Tout en courbe, son style plus féminin tranchait beaucoup avec le pragmatisme anguleux de mes dessins. Aussi lorsque l'on se retrouva pour comparer nos plans, il était évident qu'il y aurait des problèmes, mais aucun de nous ne voulait faire de concessions. Las de nos disRibaudes, la reine de l'époque trancha et l'édifice devrait être construit selon les plans, aussi biscornu soit-il."

- "C'était un bien beau fiasco ! Chaque mage et chaque sorcier nous maudissent au moins quatre fois par jours lorsqu'ils cherchent quoi que ce soit dans cette bibliothèque !", finit-il son récit en riant.

Oniria rit également de bon coeur à ces paroles. Elle se souvenait bien de cet épisode épique de la construction de la Tour des Sages. A l'époque, Na'amah venait d'arriver au pouvoir et de nommer Oniria intendante. Le royaume avait rassemblé tout le bois et l'argent nécessaires, grâce à une souscription auprès du peuple tsuchi. La Tour des Sages était le résultat de la générosité de chacun des membres du peuple guerrier. Ils avaient ainsi voulu démontrer au monde entier qu'ils n'étaient pas qu'un peuple de barbares illettrés. Et la magnificence de la Tour des Sages impressionnait même les peuples les plus raffinés...

« En effet, c'est un bien beau fouillis! confirma-t-elle. Mais il a son charme aussi et je dois dire que j'aime parfois m'isoler entre ses murs, lorsque j'ai besoin de réfléchir. Je suis sûre que personne ne pourra venir m'y retrouver avant quelques jours, voire quelques semaines...»

Observant mieux Fifrelogrelin, elle remarqua que ses joues avaient viré au rouge vif et qu'il commençait à devenir fort joyeux, avec les yeux un peu trop brillant. Elle s'était amusée de le voir moucher Kawa avec tant de répartie que ce dernier avait dû faire marche arrière. C'était sans aucun doute l'un des effets du raku sur une personne non habituée. Quand on en abusait, il pouvait même rendre momentanément aveugle... Oniria se souvint que la première fois qu'elle en avait bu, elle avait failli s'étrangler et était devenue écarlate. Du coup, elle évitait désormais d'en consommer et préférais des boissons plus... inoffensives.

Elle repoussa l'une des boucles violettes qui lui avait glissé devant ses yeux et s'adresse à Kawa.
« Si cela ne t'ennuie pas, je préférerais un jus de baies plutôt qu'un raku. J'en bois rarement. Et comme il m'arrive encore d'allaiter mes bébés, j'évite les boissons trop fortes... Il semble d'ailleurs que notre invité ait déjà eu une bonne réaction à son premier verre. Je ne suis pas sûre qu'il soit très sage de le resservir...»

Puis, avec un sourire en coin, elle s'adressa ensuite à Fifrelogrelin.
« Je suis heureuse que la bibliothèque vous intéresse. Je ne manquerai pas de vous en faire les honneurs dès que vous le souhaiterez. Les livres peuvent être utilisés sans être copiés, mais ils sont tellement rares qu'il vaut mieux en garder l'original de côté, afin de ne pas l'abîmer. Les copies sont moins fragiles et peuvent être mises à la disposition de tous.
Quant à mon époux, il n'attaque désormais plus de Tsuchis. Nous nous sommes autrefois provoqués en duel, mais il n'a finalement jamais eu lieu», se souvint-elle avec un sourire attendri. « La bataille prévue s'est transformée en mariage, un événement plutôt insolite, vu nos origines respectives, mais pas si étrange, au vu de la Prophétie...»
Elle eut cependant un petit pincement au coeur en prononçant ces mots. Il y avait si longtemps que son tendre époux était loin d'elle ! Leurs rendez-vous secrets étaient devenus si rares depuis que les sbires du Maître du chaos les traquaient... Secouant ces tristes pensées, elle décida de les laisser de côté afin de profiter de ces instants de convivialité avec ses hôtes.

« Et vous Fifrelogrelin, enchaîna-t-elle afin de relancer la conversation sur un ton plus léger. Avez-vous une fiancée? Les Cours royales doivent être remplies de jeunes filles que vos tours de bouffon ont dû séduire ». Elle sourit malicieusement à l'adresse du jeune sorcier, dont les joues flamboyèrent de plus belle.

Alors que les trois comparses sirotaient leurs boissons, et étaient de plus en plus concentrés sur la conversation, ce furent cette fois les sabots de plusieurs bêtes qui se firent entendre.
Ils entendirent la voix de Galzbar, remerciant ses montures pour leur fidélité et la force qu’elles lui prêtaient.

Une bonne dizaine de minute s’écoula avant qu’il ne fit irruption dans la salle principale de l’auberge. Mais quand il entra, Galzbar savait qui il y trouverait ! Il avait en effet reconnu les montures qui patientaient devant l’auberge, et leur avait d’ailleurs fait partager quelques miches de pain. Le Kormzib qu’il avait confié à son filleul semblait en bonne santé, la magnifique licorne d’Oniria était belle et musclée, tandis que celle de kawarshrei…et bien…elle semblait aussi bien traitée que possible, avec un beau poil brillant.

Lorsqu’il entra dans la nouvelle auberge dont il avait conçu les plans et organisé le chantier, Thorzakh fit mine d’être surpris de trouver ses amis. Ceux-ci le virent arriver en tenue de voyage, paré au combat de la tête aux pieds : son uniforme flambant neuf tout juste confectionné par Kalliwara, son nouveau jouet offert par Temüdjin flottant dans les airs autour de lui, un superbe orbe magique d’où suintait l’énergie de puissants enchantements.

« Hey, bonjour aubergiste, je vois que tu es bien installé ! Je venais justement voir comment allaient les choses pour toi avant de repartir pour Havre, mais je vois que tu as déjà du beau monde dans ton enseigne?! Cela me flatte, je vois qu’elle plait aux clients »

L’aubergiste accueilli le sorcier avec un grand sourire :
« Comme tu dis, du beau monde, mais il manque quelques danseuses, ou bien des ménestrels ! Mais bientôt, cette auberge rivalisera avec celle de la Licorne blanche, tu verras ! »

« Ha ! Je n’en doute pas…avec les mizus en moins, cependant et.. »
Mais Thorzakh s’arrêta en voyant la mine que faisait son filleul!
« Et bien l’ami !!! »
Le sorcier s’approcha de Fifrelogrelin
: « Qu’est ce qui se passe ? On ne tient pas le Raku ? Aubergiste ! J’offre la prochaine tournée à mes amis ! Et levons nos chopes à la reconstruction de Karkann ! »

A part, Thorzakh chuchota pour lui-même : « Bientôt, il faudra s’y remettre, d’ailleurs, mais il nous faudra nous réapprovisionner en bois avant…peut être reconstruire une scierie royale…ou deux… »

Galzbar se rendit rapidement compte de son aparté et se reprit :
« Pardonnez-moi, ces derniers temps je pense tout haut…j’ai tellement de choses qui me travaillent, tellement de choses que je veux entreprendre, que je me demande pourquoi Celui-qui-n’a-pas-de-nom n’a pas fait des journées avec plus d’heures! Et pourquoi n’ai-je pas 6bras et 3 têtes !!! Pfff… Mais qu’en penses-tu, Kawa, il nous faudra construire des bâtiments pour supporter les tours royales, et il nous faudra du bois pour les construire, ces bâtiments et ces tours…Oniria ?

Galzbar englouti sa première chope de Raku, et immédiatement, son teint s’allégea un peu, ses épaules se détendirent, il s’assit à la table de ses amis, tandis que son "joujou" virevoltait près de lui
« Aubergiste ! Pourquoi m’as-tu servi une chope vide !!! C’est comme ça que l’on accueille un ami ?
Allez, je te prends un pichet ! Ca me fera du bien ! Fifrelo, j’ai une licorne qui t’attend dehors, elle est pour toi! Cadeau ! Alors y a pas de « non » qui tiennent, compris? Oniria très chère, merci de prendre soin de mon filleul. S’il lui faut quoique ce soit que vous ne pouvez lui fournir, il ne faut pas hésiter à m’en faire part. »

Thorzakh rempli la chope de son filleul et de son camarade de clan avec le pichet qu’on venait de lui apporter. Puis il englouti une nouvelle chope de Raku !
« Waaaaah ! Ca fait du bien !!! »

Kawa n’avait pas pris ombrage des paroles véhémentes de son compatriote. C’était signe de sagesse, et d’humilité de ne pas avoir usé de sa position illustre et son expérience pour rabaisser un jeune novice; c’eut été facile. Et l’humilité est si peu commune aux grands personnages. Oui, effectivement ils allaient sûrement bien s’entendre. Fifrelo leva son verre.
« Mes amis, honneur aux anciens et bienvenue aux nouveaux. » Il but une rasade de raku qui sembla plus chaude encore que la précédente.

Après être sorti se rafraîchir, l'archer était revigoré et affichait une prestance flamboyante. Chasser l’ours à main nue devait lui seoir plus qu’aller cueillir la noisette.
« Un beau fiasco ? Votre bibliothèque ? Comment deux superbes architectes peuvent-il produire un fiasco ? Je n’en crois pas un mot. Peut-être y a-t-il une raison pour que cet édifice soit biscornu, une raison qui nous échappe, une raison profonde qui se révèlera elle-même le moment venu. La nature des choses n’est jamais le fruit du hasard, je pense....

Il avait repéré le petit manège d’Oniria, qui inclinait doucement la tête de manière à faire tomber ses boucles folles sur son visage afin de pouvoir les replacer d’un geste auguste et ravissant. Le raku décuplait les sens de toute évidence.... et en altérait d’autres. Un afflux sanguin lui traversait déjà le visage.
« Je viendrai à la bibliothèque dés que possible. J’ai grande hâte ! » dit-til à Oniria. « Pour ton mari, je suis fort aise qu’il ne s’en prenne pas aux nôtres. Et la confrontation engendre-t-elle souvent créativité et amour. Pas si insolite à mes yeux. Je n’en suis pas étonné au vu de ton caractère, du moins ce que j’en connais. Mais de quelle prophétie parles-tu ? Je prends tous les arts divinatoires avec prudence. Qui est le maître du chaos ? Pourquoi vous traque-t-il ? Et je n’ai pas de fiancée pour le moment, mais sur le Flambeau j’ai aperçu de loin une certaine Violine tout à fait à mon goût, si toutefois je puis parler d’une autre beauté en ta présence »
Il reprit une rasade de raku, qui acheva de lui rougir le face en totalité.

On entendit la galopade de tout un cheptel. Un homme poussa le panneau de l’entrée, c’était Galzbar, son cher parrain, qui les avait rejoints. Fifrelo se leva pour le saluer. Il voulut étreindre une forme fantomatique qui fait parfois apparition après avoir consommé en excès de certaines boissons. Il tituba dans le vide, et tâtonna pour mettre la main sur l’original. « Parrain ! » s’exclama-t-il joyeusement « Quel plaisir de te voir. Tu veux des ménestrels, de la musique ! Tu vas être servi. » Fifrelo sorti son violon qu’il avait toujours sur lui dans son ballot et entama une mélodie entraînante pour réjouir l’assemblée, tout en happant sa chope des lèvres, se penchant en arrière pour en vider le fond. C’était un peu faux et parfois grinçant mais le coeur y était. Quand il eut fini, il se rassit sur sa chaise en s’affalant sur la table. « Tu sais, pour moi cette auberge dépasse de loin celle de la licorne blanche. Et cela même si je n’y ai jamais mis les pieds. »

Fifrelo vit avec effarement qu’une chope vidé cul sec de raku n’avait fait que rehausser le teint de Galzbar, là où une demi-mesure l’avait, lui, plongé en léthargie.
« Une licorne ! Pour moi ! C’est trop d’honneur. Alors j’accepte de bon coeur ce merveilleux présent. Tu nommeras aussi ceux que je dois remercier, qui l’ont capturée et dressée. Mais que dois-je faire de mon krzombi ? Je m’y étais attaché. Oniria a raison, ça ressemble à une serpillière, je l’avais surnommé « Serpouille ». Il leva son verre une fois encore « A la santé de vous tous mes amis », puis s’effondra.

- « Voilà qui est bien dit, aux amis, aux anciens et aux nouveaux ! » dit-il levant à son tour son grand verre rempli de Raku à l’extrait de nénuphar.
Sûrement sous l’effet de ce second verre plutôt corsé, dont il soupçonnait que ce fut la façon d'Ambroise de le remercier de la poussière qu'il avait amené en entrant, il reprit la parole d'un ton facétieux : « Au moins cette tour ne récompense-t-elle que les plus méritants, ceux qui cherchent sans relâche les connaissances. Ou bien Shankara est plus taquine que l'on ne le croit et ses desseins sont de permettre à notre intendante débordée de travail d’avoir un refuge où nul n'irait la quérir ou de pouvoir jouer à cache-cache quand ses enfants auront grandi ! »

A ces mots, il reprit son sérieux et songea que de l'eau avait coulé sous les ponts pendant sa longue absence.
- « D'ailleurs, comment vont-ils ? Je n'ai pas pu, hélas, assister à leur baptême, mais d'aucuns gardent de ce jour un bon souvenir. D'après ce que j'ai entendu, ils auraient déjà de grandes prédispositions à la magie. Ces mêmes sources m'ont évoquées vos tribulations et s'il vous faut assistance, j'ai un trois pièces tout à fait confortable sur Paradis et ma lame est à votre service, aussi courte soit-elle, je gage de son tranchant et de l'habileté qu'elle a de se faufiler dans le plus petit interstice qu'offre une armure. »

En effet, Kawa n'avait de l'archer que l'habit car la seule arme qu'il semblait posséder était l'étrange lame ondulée attachée à sa ceinture. Plus habile au camouflage qu'à l'arc, il avait abandonné le tir pour l'embuscade, sa dextérité lui permettant de faufiler sa courte dague dans les angles morts et les recoins les plus farfelus de ses adversaires.

Alors que Fifrelo évoquait la jeune et jolie Violine :
- « Si je puis me permettre cher Fifrelo, méfiez-vous des Tsuchies ! Si la femme devait être une rose, à la fois belle et piquante, celles de notre bien-aimé royaume seraient assurément les plus épineuses et les plus convoitées ! Mais peut-être devriez-vous l'inviter à boire un verre, le sud de l'île est un bel endroit pour bavarder et rien de tel qu'une promenade romantique, au soleil couchant le long des plages immaculées... », il ne termina pas sa phrase et son cœur se serra alors que son visage prit un expression de tristesse pendant une fraction de seconde.

Sur ce commentaire à moitié perturbé par le bruit de multiples sabots, un sorcier, écarlate de part sa tenue et de son exposition prolongée au soleil de plomb du sud de l’île, entre dans l’auberge.

- « Tiens donc, bonjour cher collègue ! » salua-t-il son ami, alors que Fifrelo s'était levé et titubait vers Galzbar pour l'accueillir.

Puis lorsque le jeune sorcier se saisit de son instrument de musique, Kawarschrei ne s’imaginais pas qu’il parviendrait à en jouer dans son état. Mais passé les premières mesures, il décide de l'accompagner. Il sortit un étrange instrument métallique rectangulaire délicatement ouvragé. Lorsqu’il souffla d’un côté, instrument vibra et émit des notes de musique, donnant à l’air de Fifrelo un petit côté western. Les boucles violettes d’Oniria semblaient vibrer en rythme avec la mélodie des deux musiciens.

Il ne manquerait plus qu’un piano et quelques danseuses du clan du Moulin Rouge songea-t-il avec nostalgie des soirées arrosées à la Licorne Blanche alors qu’il n’était qu’un novice.

Lorsque ses deux camarades s’assirent, Kawarschrei reprit la parole d’un ton aussi sérieux que possible alors qu’un sourire facétieux lui fendait le visage de part en part. « Tu tombes à point nommé Galz’, nous parlions il y a peu du goût quelque peu douteux de l’architecte qui a conçu cet établissement. Qu’en penses-tu ? N’aurait-il pas un peu abusé sur le Raku avant de tracer ses plans ? »

Reprenant finalement son sérieux au sujet des scieries :
- « Sans doutes quelques scieries seraient utile au royaume, mais il doit y avoir également de nombreux bûcherons qui pourraient également œuvrer dans l’actuelle pour aider dans l’effort de reconstruction. »

A la mention des licornes par Galzbar, il s’adresse plus en particulier à Fifrelo :
- « Oui, une licorne est un bien précieux. Rare sont celles qui courent encore en liberté, mais ce sont des créatures très affectueuses. Si tu la traite bien, elle te suivra au bout du monde et te rendra ton amour au centuple. J’ai dressé Ashanys, ma licorne, il y a bien des années. On a beaucoup voyagé et elle m’a sauvé la vie plus d’une fois ! Par contre, je ne sais pas si ce n'est que la mienne, mais elle a un petit caractère qui peut être assez surprenant. »

Se tournant subitement vers Galzbar qui buvait cul-sec son Raku :
- « En parlant de ça, c’est du un pain de seigle que je vois dans ton sac ? J’espère qu'il n'y as pas de raisins secs dedans et tu n’en a pas donné à Ashanys, elle adore ça mais elle les digère très mal ce qui la rend très irritable et j’ai pas envie de faire le chemin à pied pour rentrer à la citadelle ! »

Il n'avait pas fini de parler que Fifrelo semblait assoupi et qu'Ambroise resservait Oniria avec une de ses spécialités à base de jus de divers fruits et dont il ne voulu pas partager la recette.

- « Le Raku fais toujours cette effet là au début », finissant une nouvelle chope, il sembla lutter puis ses paupières se fermèrent et sa tête bascula en arrière. En même temps, un petit ronronnement commença à se faire entendre.

Galzbar avait assisté avec plaisir au petit spectacle musical que ses deux compagnons avaient entrepris. Un peu de gaieté faisait du bien après la bataille que Karkann avait essuyée, et le sorcier regrettait que Mahîna ne soit pas à ses cotés pour l'occasion. Une fois que les deux musiciens eurent terminé, Thorzakh se mit à rire aux éclats en réponse à la petite pique lancée par Kawarschrei!
Ha, si je m'étais saoulé en concevant cette auberge, elle aurait probablement été pensée de manière fantaisiste! Je l'aurais peut-être conçue plus romantique, un peu plus proche de la plage et avec des espaces privés, et les fenêtres des chambres auraient eu vue sur la plage .

Mais Thorzakh reprit son sérieux en continuant sa réponse :
Mais n'oublie pas que la fonction première de cette auberge est militaire. Jamais je n'aurais bu une goutte d'alcool pour concevoir un bâtiment d'utilité stratégique. Regarde un peu, les fenêtre ne donnent pas sur la plage, mais bien sur le totem, et avec un oeil attentif, tu remarqueras que beaucoup de détails ont été pensés avec l'optique de facilité la défense des lieux. Pour ce qui est du confort et du cadre enchanteur, il faut remercier ambroise et les arrangements mobiliers qu'il a accomplis.

Pour ce qui est des bucherons, j'ai bien peur que notre royaume n'en compte malheureusement plus autant qu'à l'époque ou Karkann était encore en pleine expansion, ce qui rendra notre approvisionnement en bois assez laborieuse, je le crains.

Puis, alors que Kawarshrei demandait ce que Galzbar avait donné à Ashanys, le sorcier prit un ton plus léger, et esquissa un sourire malicieux :
Alors comme ça ta licorne adore les raisins secs? J'y penserai pour la prochaine fois. Mais si ça peut te rassurer, aucun raisin aujourd'hui.

Lorsque ses compagnons s'assoupirent sous l'effet du Raku Raku, et qu'Oniria demanda l'aide de Thorzakh pour les déplacer vers les chambres, Thorzakh se leva, tituba un instant, puis, après s'être stabilisé en se maintenant sur la table, grommela :
Bah, tu sais qu'il existe un sort contre les effets du raku raku? Regarde bien!

Galzbar s'apprêtai à lancer un sort quand il se rappela qu'il ne l'avait pas encore étudié.
Euh...Désolé mais tout compte fait, je crois qu'on va devoir les porter à leur chambre.
Laisse moi juste le temps d'aller me rafraichir un peu, et je t'aiderai.

Le sorcier demanda un baquet rempli d'eau fraiche à Ambroise, et sortit avec. Quelques instants plus tard, on entendit de l'eau être renversée, juste dehors, et quand il revint, Thorzakh était trempé, mais bien plus éveillé.

Allons-y

Quand il se leva, Oniria se rendit compte que Galzbar était lui aussi sous l'emprise du raku. Il ne semblait pas très stable sur ses jambes. Elle se mit à rire lorsque le sorcier se souvint qu'il n'avait pas appris le sort permettant de dessoûler plus rapidement... Hochant la tête d'un air résigné, elle attendit son retour en finissant son verre de jus de baies et en observant les deux autres lascars qui ronflaient en choeur.

Elle sourit malgré elle, attendrie. Le retour de Kawa, après des mois d'absence, de même que celui de Galzbar, lui réchauffaient le coeur. Et l'arrivée de Fifrelo apportait un peu de sang neuf à leur royaume qui avait eu tendance à se laisser glisser dans la torpeur ces derniers mois. Le sorcier venait d'intégrer les Coeurs de Dragon et son recrutement portait à trois le nombre de nouveaux compagnons de cette semaine. Shana et Munlik Huchki avaient en effet dissous le clan des Flammes écarlates dont ils restaient les seuls membres, afin de rejoindre les CDD. L'arrivée de ces trois petits nouveaux redonnait un coup de fouet à tous les autres. Oniria était heureuse de ce vent de renouveau qui soufflait à la fois sur son clan et sur le royaume, avec l'arrivée au pouvoir d'Ender. Elle espérait pouvoir le conseiller au mieux dans le difficile exercice du pouvoir. Il fallait d'ailleurs qu'elle en parle avec Galzbar, qui avait autrefois partagé avec elle les sièges du Conseil royal.

Il était d'ailleurs en train de revenir de sa douche improvisée. Oniria éclata de rire en le voyant trempé de la tête aux pieds.
« Pas mal ton sort contre les effets du raku », le taquina-t-elle.
Puis, poursuivant sur un ton plus sérieux, elle fit un geste de la main vers Ambroise qui s'approcha aussitôt.
« Notre cher aubergiste a accepté de nous donner un coup de main. Les chambres sont en haut. On commence par qui?»

Galzbar répondit à la petite pique d’Oniria par un sourire simple. Sa joie et sa bonne humeur l’enchantait.
Sache que de toute façon, le véritable sort qui permet d'éliminer les effets du raku fait appel à certaines énergies maléfiques, et qu’à ce titre il est déconseillé, et de toute façon interdit, de s’en servir sur les membres de notre bien aimé peuple. De quoi aurais-je l’air si je me faisais arrêter et jeter au cachot pour avoir dessaoulé deux camarades de beuverie! Viendrais tu m'aider à m'évader? Et puis…un seau d’eau suffit amplement, vois comme je suis à nouveau frais et dispos! Je me demande comment nos deux zigotos réagiraient si on les jetais dans l'abreuvoir de nos montures...

En fait, j'ai une meilleure idée...allez, montons les, tu vas comprendre.

Commençons par Fifrelo, il sera plus facile à porter que notre combattant de l’ombre.[/b]

Alors qu’ils commençaient à monter le jeune sorcier, Thorzakh remarqua les trainées d’eau qu’il laissait derrière lui.
Hum…euh… au passage, Ambroise, je suis désolé pour l’eau que j’éparpille partout, je te promets que j’essuierai tout ça avant de partir.
Tout juste se déchargeait-il de leur premier ami à l'étage que Thorzakh eut un léger vertige. Décidément, il tenait mieux l’alcool, autrefois.
Dites moi, la recette du raku raku a-t-elle été changée au cours de ces dernières années? J'ai l'impression de ne plus tenir l'alcool que dans le temps!
Cela ne les empêcha pas pour autant de monter m’archer émérite qui, complètement inconscient, ronflait comme Galzbar n’avait jamais entendu personne ronfler.

Pour l’occasion, Thorzakh se permit une petite blague, et demanda de l’encre à l’aubergiste. Ambroise le regarda malicieusement, et se dépêcha de lui apporter un petit flacon.
Ne t’en fait pas, Ambroise, je te rembourserai ce flacon en même temps que je paierai pour leurs chambres.

Alors que Thorzakh commençait son méfait, il commenta son oeuvre
Alors comme ça, tu parlais il y a peu du goût quelque peu douteux de l’architecte qui a conçu cet établissement, et tu suggère que j'aurais bu du Raku en concevant mes plans! Et bien voilà, tu sauras maintenant quel genre de dessins je fais sous l'effet du Raku Raku! Mwahahahaha!
Thorzakh se rappela subitement qu'il n'était pas seul, et quand il leva les yeux vers elle, il s’attendait à voir Oniria froncer les sourcils.

Hum...

Voyant qu'Oniria la réaction d'Oniria, Thorzakh éclata d'un grand rire sonore en déclarant :
Haha, regardez moi ça, trois fiers tsuchis, fervents défenseurs de Karkann, en train de s'amuser comme des enfants avec un encrier et un guerrier endormi!

Puis Thorzakh prit un ton mielleux pour taquiner Oniria :
Chère complice, j'ai hâte de vous retrouver endormie devant une pile de livres de la Tour des Sages. Je pourrais y porter mon art à son apogée, sur votre minois qui peine tant à contenir votre amusement face à mes idioties! Tenez, indiquez moi donc quand vous vous rendrez dans ce lieu si calme pour un séjour prolongé, et je vous assure que plus jamais vous ne vous risquerez à vous endormir en un lieu public.

Reprenant une voix presque normale, le sorcier se reprit:
Mais...chère amie, vous avez raison, parlons de choses sérieuses.

Thorzakh pouffa, et, faisant son possible pour reprendre finalement son sérieux, indiqua les escaliers à Oniria :
Nous serons certainement plus à l'aise assis autour d'une table pour discuter de ces sujets! Honneur aux dames, Oniria! Et ne t'en fais pas, j'arrête là mes bêtises... pour aujourd'hui.

Fifrelo ouvrir un oeil lourd qu’il roula tout alentours. Une fois de plus il s’éveillait dans un endroit différent de celui où il s’était endormi, mais bien la première fois dans une couche aussi douillette. Communément, étables et tas de fumier l’attendaient aux portes de Morphée; souvent victime de mauvais plaisants. Il vit qu’il se trouvait toujours à la taverne. Il se leva et chercha ses compagnons. Dans une chambre voisine il trouva Kawa encore las. Son visage affichait un dessin au tracé à la fois assuré et imprévisible, mais inachevé. L’encrier était resté à la tête du lit. De quel rite paien ces traits audacieux étaient-ils l’expression ? Fifrelo ramassa la plume et entreprit de finir l’ouvrage. Mue par une volonté créatrice et une main leste, la parure de dame l’oie sillonnait le visage de Kawa de courbes entrelacées mêlées de saccades et de taches sitôt essuyées d’un revers en longues traînées baveuses. Son faible talent pictural n’avait rien de commun avec son prédécesseur et toute espérance artistique était désormais noyée dans l’encre noire. Fifrelo décrocha le petit miroir du mur avant de sortir sur la pointe des pieds et refermer doucement la porte.
Il descendit les escaliers pour rejoindre la salle principale et son oeil fut attiré en contrebas par le rouge vif de journaux gisant au sol. C’était le « Tsuchi mag », certainement un nouveau quotidien local. Il s’empara de l’un d’eux et en feuilleta vivement les pages à la recherche de la rubrique nécrologique. Son récent métier de légiste lui imposait une recherche constante de cadavres frais et coopératifs. Mais déception, on ne mourait pas souvent ces temps-ci... Fifrelo referma le journal. « ils sont trop rouges » dit-il « et bons pour des poissonniers »

Lorsque Kawarschrei se leva, Laethanter avait déjà bien entamé son inlassable course dans le ciel.
La bouche pâteuse et la tête lourde, il se leva et failli trébucher sur un miroir.

« Sans doute Ambroise n’avait-il pas fini d’aménager toutes les chambres », pensa-t-il alors qu’il inspectait le reste de la pièce à la recherche d'une quelconque fourberie de la part de son ami. Mais en vain. « Tiens donc ! Galzbar ce serait assagi, voilà qui serait bien étonnant ! » se surprit-il à penser à haute voix.

Sa besace était sur un fauteuil placé en direction de la fenêtre qui donnait sur une magnifique vue sur la mer. Juste à côté, il vit l'encrier posé sur le petit bureau et il se souvint qu'il avait encore un article à écrire. D'un pas pressé, il descendit les marches menant à la salle principale où était assis un étranger emmitouflé dans sa cape de voyage tandis qu'Ambroise discutait avec une jeune femme. La reconnaissant aussitôt, il vint la saluer alors que le tavernier lui servait un Raku Raku dont la bouteille était ornée d'un nénuphar.

« Bien le bonjour Dame Calypso ! Me permettrez vous de vous offrir cette boisson que vous venez de commander ? » dit-il avec emphase. Et ne lui laissant guère le choix il s'adressa à Ambroise. « Mettez la boisson de cette dame sur mon ardoise et servez à notre énigmatique voyageur ce qu'il voudra ! Quant à moi je prendrai un Raku Raku, car comme dirait mon père : il faut soigner le mal par le mal ! »

Se retenant de rire en voyant le visage tout peinturluré de l'archer, le tavernier prit note et servit l'archer alors que celui-ci continuait. « D'ailleurs, je tiens à vous féliciter pour le confort de vos chambres ! J'y ai passé une excellente nuit et la vue sur la mer est magnifique. Je regrette de ne pas avoir pu en profiter hier soir. » C'est au prix d'un effort intense, qu'Ambroise parvint à lui répondre sans éclater de rire : « Merci, je transmettrai vos compliments à mon épouse car la décoration et le choix du mobilier sont de son fait. »

Ambroise se dirigea vers l’homme au fond de la salle pour prendre sa commande tandis que Kawarschrei s'asseyait négligemment sur un tabouret, dos au comptoir pour parler avec Calypso tout en gardant à l’œil le reste de la salle. « Alors qu'Oniria se tenait encore à votre place hier, vous voilà ici aujourd'hui ! Cette taverne semble attirer les plus belles femmes de l'île ! » continua-t-il avec ce même excès de galanterie. Puis il reprit plus simplement. « Qu'en penses-tu ? Est-elle à ton goût ? »

Depuis combien de temps n’avait-t-il revu sa taverne natale ? Fifrelo avait depuis été mandaté par l’intendante du royaume en personne pour une enquête des plus importantes. En effet, un vol avait été commis au sein du clan. Seule la tenancière Dame Evea, dont la taverne abritait les plus vils soûlards seizons, trafiquants en tout genre, canailles de la pire espèce, eut pu nous mettre sur une piste. Je vous laisse imaginer la fierté d’un jeune novice partant à l’aventure à l’autre bout du monde avec pour seuls compagnons ses chansons et ses rêves de gloire, nanti d’une confiance qu’il s’efforcerait d’honorer! L’intendante lui avait bien donné des ordre précis pour accomplir sa mission, et Fifrelo se doutait que si elle ne se chargeât pas elle même de la besogne c’était pour mieux fricoter à son aise dans les recoins cachés de la bibliothèque avec son époux qui avait depuis peu rejoint nos rangs.

Dame Evea habitait sur l île d’Oubli. Fifrelo parvint à son antre au terme d’un harassant voyage. Il s’adressa à elle en ces termes :

"Chère Dame Evea
Je souhaitais ardemment vous rencontrer. Voyez-vous, une mission de reporter que mon clan m’a déléguée, m’a fait parvenir jusqu’à votre taverne - endroit fort agréable - pour vous entretenir d’un sujet que je qualifierais d’ « insolite ». Laissez moi vous en exposer les faits. Vous connaissez certainement LeGrodompteur(1), membre éminent du clan des Poumons-de-Chevreuils(1), chevalier noble et vaillant, décoré de nombreux mérites et grand stratège militaire. Vous devez vous douter que les grands personnages eux aussi ont leurs petits travers, des petites manies apparemment sans importance mais qui revêtent pour eux un intérêt capital. Et bien figurez-vous qu’il y a quelques jours LeGrodompteur(1) a perdu un objet auquel il tenait beaucoup. Un porte-bonheur certainement. Il s’agit, d’un....euh....d’un caleçon....un caleçon de couleur rouge. Si son possesseur y accorde tant d’attachement, nous pouvons facilement imaginer que cette étoffe a du traverser des contrées sauvages et inexplorées, participer à de nombreuses et glorieuses batailles, approcher de grands rois et côtoyer des maîtres et des dieux, qui sait ? Il a vécut et vibré de concert avec son porteur, et cela nul ne peut le nier. Aussi sommes-nous activement à la recherche de ce caleçon, dont la perte, ou le vol – comme nous en avons émis l’hypothèse - a mis en émoi notre confrérie. Notre ami LeGrodompteur(1) est abattu depuis, il est taciturne, il s’enferme chez lui et n’en sort plus, il ne se rase ni se lave. Sur ce dernier point, je vous l’accorde, cela, ne change pas de d’habitude. Mais revenons-en au fait ; auriez-vous par hasard ouï quelque information à propos de ce caleçon rouge ? Peut-être est-il au centre d’un plus vaste trafic de caleçons ou de vêtements au sens large ; auriez-vous entendu parler de pareille machination ? Les tavernes sont propices au déliement des langues. Enfin connaîtriez-vous sur Sistearth un fétichiste des caleçons ? Nous pensons que c’est un mobile probable. Nous espérons mon clan et moi que vous pourrez nous renseigner de manière à aider notre ami.
Je vous adresse, en attendant, mes hommages respectueux et vous souhaite prospérité en affaires tant qu’en santé. En restant à vostre écoute."

Fifrelo espérait la réussite de sa mission. Qui sait, cette relique serait-elle un jour l’étendard glorieux sous lequel se rallieraient tous les sujets du royaume ; un symbole écarlate portant fierté et honneur, courage et liesse. Devant, trembleraient leurs ennemis.
Dame Evea lui offrit un raku, qu’il prit soin de conserver jusqu’à la sortie de l’établissement, voulant paraître au plus à son avantage. Puis il le but d’un trait et se lança sur le chemin du retour au triple galop. Mais ce raku et toutes ces aventures avaient plongé Fifrelo dans une béate somnolence qui l’amena bien vite en un doux et profond sommeil. Il fut bercé de songes merveilleux. Etant resté en selle, il ficha sa licorne dans un platane en bord de route. Ce n’est que grâce à l’aide de villageois qu’il put libérer sa monture et rallier au plus vite sa chère taverne « de la Plume du Dragon ».
(1) les noms ont été volontairement modifiés afin de garder l'anonymat et ne pas influer sur l'enquête jusqu'à ce que lumière soit faîte sur ces évènements.

Alors qu'il revenait de la tour des sages, Glazbar ne s'attendait pas à ce que l'auberge se soit si rapidement peuplée. A peine le seuil de la porte d'entrée dépassé, le sorcier s'arrêta pour observer les nouveaux arrivants.
Fatallica, le fameux draconien dont l'intervention avait sauvé Karkann quelques années auparavant, avait pris place à une table sur laquelle reposaient les restes de tout un banquet. Rien d'étonnant, pour quelqu'un de sa carrure.
Face à lui le sorcier reconnut tenait Calypso, la brave mage que Galzbar avait eu l'occasion de croiser à plusieurs reprises ces derniers mois.
Elle était en pleine discussion avec Kawarschrei qui avait pris place au comptoir.
Quant à Fifrelo, et bien...où se cachait donc Fifrelo? Encore en train de décuver son alcool probablement.
Thorzakh se dirigeait vers Kawarschrei quand il remarqua dans un coin une silhouette inconnue.
Il demanda alors discrètement à son ami :

Dis moi Kawa, cette personne encapuchonnée là-bas, tu sais qui c'est? Il à l'air de vouloir rester discret, mais..haha! Quel meilleur moyen pour se faire remarquer que de montrer qu'on veut se cacher!!

« Oui, j'espère aussi que cette taverne sera prospère, mais également qu'elle attirera de nombreux touristes et voyageurs. Personnellement, je trouve que les plages ici n'ont rien à envier à celle de Paradis. Surtout que la dernière fois que je suis allé m'y détendre; j'ai surpris Hijo qui épiait les jolies tsuchies en maillot de bain à l'aide d'un "soit-disant" sort d'invisibilité de son invent... », répondit-il à Calypso avant d'être coupé par la brutale entrée de Fatallica.

Surpris, il n'osa pas le saluer à haute voix mais lui fit machinalement un bref signe de la tête.

« Enfin bref. Vous avez raison, je suis très occupé ! Depuis le lancement du Tsuchi Mag', je n'ai plus une seconde à moi ! Mais le succès semble au rendez-vous et c'est une expérience enrichissante. », reprit-il.

Dès lors que le thème du Tsuchi Mag' avait été abordé, il semblait intarissable sur le sujet. Le Raku Raku semblait avoir cet effet là sur pas mal de monde. Ce n'est qu'a l'arrivée de Galzbar qu'il s'arrêta (enfin?) de parler pour le saluer. Lorsqu'il rejoignit Calypso et Kawarschrei au comptoir, ce dernier lui tendit une choppe qu'Ambroise venait de remplir, et tout aussi discrètement que Galzbar lui avait posé la question, il lui répondit :

« Aucune idée. Il était déjà là quand je suis arrivé et il semble attendre quelque chose ou quelqu'un.
Ne serait-ce pas notre gazette qu'il a dans la main ? »

Le sorcier tenta d'observer discrètement l'inconnu et remarqua en effet qu'il était en possession du magazine.
Soudain conscient de son impolitesse envers Calypso, Thorzakh s'adressa alors à elle :
Hey, bonjour. Je suis désolé, quand quelque chose me tracasse, il m'arrive d'occulter ce qui se passe autour.

Galzbar commença à se diriger vers le mystérieux client. Au passage, il salua distraitement Fatallica. Ce n'est qu'arrivé à quelques pas de l'objet de sa curiosité qu'il remarqua quelque chose d'étrange. Sous le manteau en lambeaux qu'il portait, l'étranger portait une tenue...
Thorzakh s'arrêta net.
Réfléchissant aussi vite qu'il en était capable, il analysait la situation : un mizu, le tsuchi mag à la main, la taverne étant sur karkann, aucun soutien mizu à proximité, un draconien puissant , un archer de son clan et une mage renommée juste derrière, tous prêts à se battre si besoin. Ce n'est donc qu'une seconde plus tard qu'il se rapprocha et prit place face au mizu.

Bonjour l'ami! Ca faisait longtemps!
Thorzakh ne voulait pas qu'un combat éclate et ravage l'auberge toute neuve. Discrètement, il changea alors de discours, aussi doucement que possible. Dos au reste de la taverne, il espérait que les autres ne remarqueraient pas son cinéma.
Vous en avez fait du chemin, et vous vous êtes mis dans un sacré pétrin. Qui êtes vous et que faites vous ici! Au moindre geste suspect, vous serez grillé, criblé de flèches et comprendrez la force d'un groupe de combat tsuchi. Vous avez intérêt à avoir de bonnes raisons d'être ici si vous ne voulez repartir les pieds devants.
Alors, qu'est-ce que tu deviens! Tu n'as toujours pas fait fortune à ce que je vois en tout cas!

Petit à petit l'Hiaste lui revenait au fur et à mesure que les conversations se déliaient. Comme quoi passer du temps dans une bibliothèque ou discuter avec Yindo avait du bon. Il lui manquait presque plus rien pour devenir bilingue. Il avait réussi à comprend que Galzbar était l'auteur du Tsuchi'Mag et justement celui-ci s'approcha de lui.

Un silence, une tsuchie passe, un clin d'oeil comme quoi c'était grillé depuis un petit moment mais qu'il avait encore quelques heures, minutes, secondes avant que tout explose.

Galzbar s'approche. Il va falloir jouer serrer. Ecran noir, l'aubergiste s'assoit à sa table.

Thorzakh dit: Bonjour l'ami! Ca faisait longtemps!

Effectivement cela faisait longtemps mais pas dans cette auberge et très loin d'ici dans une ile oublié sur un champs de bataille entre Mizu et Tsuchi. Le mage réfléchit à toute vitesse.
D'une, il n'a pas vendu la mèche. Va savoir pourquoi. Peut-être éviter du grabuge dans son auberge.
Deux, il engage une conversation amicale pour lui laisser un peu de temps. Je vais donc avoir le temps de négocier

Thorzakh dit doucement: Vous en avez fait du chemin, et vous vous êtes mis dans un sacré pétrin. Qui êtes vous et que faites vous ici! Au moindre geste suspect, vous serez grillé, criblé de flèches et comprendrez la force d'un groupe de combat tsuchi. Vous avez intérêt à avoir de bonnes raisons d'être ici si vous ne voulez repartir les pieds devants.

Là, c'est clair, je peux même négocier. Il faut faire vite cependant.

D'une voix plus forte de l'aubergiste: Alors, qu'est-ce que tu deviens! Tu n'as toujours pas fait fortune à ce que je vois en tout cas!

Vite répond lui et prie pour que ta langue ne te trahisse pas

Une réponse en parfait Hiaste bien qu'avec un petit accent de Kranem: M'en parle pas !! C'est la dèche de la dèche. J'essaye bien de faire du commerce mais à peine les affaires marches, il y a un étranger qui vient foutre le bordel. Entre les vampires, boureau, sirène et triton, j'ai pas fait de bénèf. Juste de quoi me payer un bateau Reikon d'urgence vers la capitale pour éviter des Exilés.

C'est là que je suis tombé sur ça

Montre le Tsuchi'Mag et en particulier l'annonce sur la vente de fleur.

Parfait donc pour renflouer mes caisses. J'ai de quoi négocier.

Sort un retouraporteur qu'il range ensuite.

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Forum Roleplay => Roleplay Libre => Discussion démarrée par: Oniria le 19 Juillet 2013 à 13:16:38